Placés sous le signe de la pensée politique de Hannah Arendt, ces dialogues portent sur une anthologie d’articles parus pour la plupart dans l’entre-deux-guerres. Inactuel, ce discours produit une narration historique originale, perspective, lumière et visibilité en rupture avec le sens commun. Nous proposons de revenir sur – non pas de revenir à – ce discours sur un mode réflexif en s’aménageant une voie d’accès indirecte, en se posant la question : quel est-il le sens, la raison d’être de cette édition, à quel besoin répond-elle, pourquoi l’ultragauche et les communistes de conseils ? Karl Korsch, Paul Mattick, Anton Pannekoek, Otto Rühle et Helmut Wagner représentent-ils un « exemple », dans le sillage de Rosa Luxemburg et de Karl Liebknecht ? « Voulons-nous vivre avec » (Arendt) ? En effet, dès lors qu’une norme ou mesure « autorisée » en vient à faire défaut, qu’on se trouve dans l’incapacité de subsumer le particulier sous l’universel, on en appelle à un exemple – d’où sa fonction de « béquilles du jugement » (Kant) ou de Tiers, pour actualiser, sans aucun étalon de mesure, la faculté de juger, d’arbitrer entre valeurs opposées : esthétiques (quant au beau), éthiques (quant au bien), politiques (quant au juste). Alors les communistes de gauche sont-ils des acteurs exemplaires, représentent-ils un cas pouvant inspirer l’action ? Or affirmer cela c’est déjà rechercher l’acquiescement ou le consentement d’un public de spectateurs, comme dans le jugement de goût esthétique.

En prenant le contre-pied d’une passion contre-révolutionnaire aussi anhistorique qu’intéressée, bref apologétique, nous nous poserons, dans cette première rencontre autour de Communistes de conseils contre le capitalisme d’Etat, la question de la Révolution à partir de l’expérience de l’ultragauche allemande, de ses acquis décisifs et de ses limites inévitables.